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mercredi 4 septembre 2013

Numenéra (2/2)

Et voici la seconde et dernière partie de notre critique de Numenéra.

Le 9ème Monde

La description d'une partie du monde de Numenéra s'étend sur un peu plus de 90 pages. Elles s'attardent, à part égales, sur Bastion (Steadfast) et les Terres Extérieures (The Beyond). J'attendais beaucoup de ce chapitre car j'espérais y voir développé l'ambiance très particulière de cet univers.

Familiarité et exotisme

Faire dans l'exotique pur et dur est un exercice souvent périlleux en JDR. On prends toujours le risque de "perdre" son lecteur et ses joueurs. Sans références claires il est difficile de se représenter le monde, le personnage que l'on va jouer et ses motivations. Des univers comme Tekumel, Talislanta ou Jorune, s'ils sont restés dans les esprits en raison de l'originalité de leurs univers n'ont pas été (à ma connaissance) de grandes réussites commerciales. Avec la séparation entre Bastion et les Terres Extérieures, Monte Cook a tenté de ménager la chèvre et le chou.



Bastion

Bastion est relativement proche des univers de fantasy les plus traditionnels : une société féodale, une religion puissante (l'Ordre de la Vérité), neuf royaumes prêts à en découdre... La description de chaque Royaume met en avant son dirigeant, les lieux les plus représentatifs et quelques PNJ. C'est généralement à ce dernier niveau que l'on retrouve la saveur de Numenéra : une forêt exploitée à l'aide de machines steampunk, une obélisque qui aspire l'eau de la mer, des statues gigantesques qui flottent dans le ciel, gardiennes oubliées d'une cité disparue... De façon générale, le décor est étrange mais même après un milliard d'années les humains restent les mêmes : guerres, querelles commerciales, problèmes de succession, schisme au sein de la religion "officielle". Les différents PNJ proposés sont toutefois bien trouvés et représentatifs de l'univers (des jumelles qui volent les colonnes vertébrales de leurs victimes, des esclaves maintenus dans l'obéissance par une ancienne technologie, un homme de verre errant dans le désert, des phénomènes naturels inexpliqués... Si une lecture en diagonale peut donner l'impression que Bastion n'est qu'un univers de fantasy avec quelques bouts de science-fiction jetés au hasard c'est loin d'être le cas. Les nombreux détails parsemés dans le texte donnent à l'univers une saveur bien particulière, sans aliéner le lecteur.

Les Terres Extérieures

En revanche, une fois passé dans les Terres Extérieures, Monte Cook se permet d'aller plus loin dans l'étrange. En résumé essayez de voir les Terres Extérieurs comme lieu où vous pourrez donnez libre cours à votre imagination : communauté dirigé par une IA schizophrène, une forêt de cristal qui ne pousse que la nuit, une communauté repliée dans une vallée protégée par des machines volantes... Faites-vous plaisir. De toute manière Monte Cook ne vous laisse pas seul et fournit un nombre important de lieux étranges et de PNJ haut en couleurs : une gigantesque machine gardé par des humanoïde à quatre-bras, une cité qui rend fou, une tour qui va se perdre dans les nuages (et que le premier "Jack" a escaladé il y a des siècles pour découvrir un château occupé par un géant...), une cité sous-marine...

J'ai apprécié l'écriture de Monte Cook qui évite l'écueil du ton "encyclopédique" de nombreuses descriptions d'univers. C'est dans l'ensemble assez vivant mais surtout inspirant, les pistes de scénarios ne manquent pas...



Les organisations

Ce chapitre présentent quelques unes des organisations les plus importantes et là Monte Cook donne dans la facilité. Par exemple la Convergence est une association de personnes qui recherchent les anciens savoirs pour acquérir davantage de pouvoir ("Pourquoi sont-ils méchants ? Parce que !"). Les Angulans Knights sont une resucée des Chevaliers de la Pureté de Gamma World, des paladins (version facho) de Donj' et de l'inquisition espagnole version Monty Python ("Nobody expects the Angulan knights !"), un culte qui pense tellement que les conflits sont les moteurs de l'histoire qu'ils n'hésitent pas à les déclencher (encore un cas de "Pourquoi sont-ils méchants ? Parce que !"), on a également des pirates à la Nemo (les Red fleets et leurs sous-marins) et enfin des jardiniers/guérisseurs... Un chapitre assez décevant dans l'ensemble, surtout qu'il arrive après la description de l'Université des Portes, beaucoup plus imaginative et inspirante.

Le bestiaire

Les choses s'arrangent avec le bestiaire. Les 45 créatures décrites sont assez réussies (de l'abomination organique au monstre biomécanique issu d'un lointain passé). Je regrette juste l'inclusion de quelques peuples dont la seule vocation est de servir de punchingball aux joueurs. Cela manque singulièrement de finesse dans un univers qui pourtant n'en manque pas. C'est toutefois facile à corriger pour le MJ.

Les objets mag... Les Numenéras

Un chapitre dédié à la technologie du 9ème Monde et principalement aux objets techno-magiques que les PJ seront amenés à découvrir. C'est complet, utile et bien traité et de plus l'ensemble des objets décrits ne servent pas qu'à taper sur la tête de son voisin.



Les conseils au MJ

Je n'ai lu ce chapitre qu'en diagonale et pour l'instant j'ai apprécié les conseils destinés à aider le MJ à présenter et faire vivre l'univers si particulier de Numenéra.

Les Aventures

Numenéra propose quatre aventures :

The Beale of Boregal (12 pages) : une aventure destinée à introduire les PJ et le MJ  en douceur dans le 9ème Monde. Je trouve l'antagoniste des PJ assez bien trouvé et le final de l'aventure devrait proposé un choix intéressant aux PJ.

Seedship (6 pages) : un bon vieux donjon. A la lecture ce n'est pas celui qui me tente le plus.

The Hidden Price (5 pages) : une aventure dans le milieu criminel d'une grande ville. Simple mais bien ficelée.

Three sanctums (9 pages) : une aventure assez classique qui oppose les PJ à des méchants qui tentent de s'approprier une technologie très puissante. Les lieux sont assez sympathiques et c'est toujours un plaisir de botter le cul des méchants. En gros c'est très pulp et à la lecture je pense qu'il y a moyen de passer deux soirées sympathiques.

L'avis de l'Ours

Je suis très content d'avoir surmonté les a priori que j'avais sur Monte Cook et d'avoir investi dans Numenéra. On a là tout ce qui me plait dans un jeu de rôle : un univers dépaysant et bien développé servi par des règles adaptées. La lecture donne envie d'écrire des scénarios et de jouer (pas de pondre un hack pour l'univers de votre choix, ou de bidouiller vos règles, syndrome un peu trop présent dans pas mal de sorties récentes...). C'est une réussite en ce qui me concerne et j'ai hâte de voir les ouvrages suivants de la gamme.

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